Le temps est venu – une fois de plus, pourrait-on dire – de se pencher sérieusement sur la possibilité d’accommoder les citoyens et de permettre le paiement des taxes avec plus de flexibilité.
Les conseillers Pascale Albernhe-Lahaie et Richard Dober ont d’ailleurs formulé une demande à la direction générale de la Ville pour que ce sujet puisse faire l’objet de discussions en comité permanent. On souhaite notamment discuter de la possibilité de payer le compte de taxes en plusieurs versements et de l’abaissement du taux d’intérêt applicable sur les taxes impayées.
Récemment, un citoyen bien connu pour ses observations et ses critiques envers l’administration municipale, relançait lui aussi une telle proposition. Guy Godin suggère de permettre le paiement en quatre versements, avec possibilité de réduction pour les contribuables qui régleraient en un seul ou en deux versements.
Ce n’est pas la première fois que le sujet de l’étalement des paiements de taxes municipales rebondit à l’hôtel de ville ou dans la sphère publique. Mais en cette période d’inflation et de hausse des taux hypothécaires, la question revêt, disons, une pertinence différente.
Trois-Rivières fait un peu figure de retardataire dans les options de paiement qu’elle offre à ses citoyens. Depuis la fusion de 2002, les contribuables trifluviens peuvent payer leurs taxes municipales en deux versements, pas plus. Il y a bien eu, pendant quelques années à partir de 2009, ce contrat donné à une entreprise privée, Centrale Taxes, pour permettre l’étalement des paiements ou l’accumulation de fonds dans un compte en fidéicommis. Mais cette possibilité n’aura fait que passer, principalement en raison du fait qu’il fallait s’inscrire auprès de ce fournisseur externe et que le processus n’était pas très invitant.
En 2014, Centrale Taxes a mis fin au service parce que, disait-on, il y avait un nombre insuffisant d’inscriptions à Trois-Rivières.
Avant la fusion, l’ancienne ville de Trois-Rivières permettait le paiement des taxes en trois versements. Mais en 2002, on s’en était remis à la pratique en cours dans une majorité des villes fusionnées et on avait fixé à deux le nombre de versements. En 2007, la question avait été soulevée au conseil mais on avait préféré demeurer à deux versements, principalement pour des questions de rentabilité, disait-on.
C’est que les villes et les municipalités tiennent aux revenus d’intérêts générés par le placement des sommes perçues en taxes foncières à des moments fixes de l’année.
En 2013, l’ancien parti politique municipal Force 3R avait fait de l’étalement du paiement des taxes un engagement électoral, tout comme la candidate à la mairie Sylvie Tardif. Elle avait même chiffré cet engagement à 195 000 $ et estimait que cela permettrait de donner un peu de répit aux contribuables.
L’idée avait été reprise, en 2017, par Yves Lévesque alors qu’il sollicitait un cinquième mandat à la mairie. Il en avait fait un des rares engagements électoraux de sa campagne. Plus récemment, lors de l’élection de 2019, c’est le candidat Jean-François Aubin qui s’engageait à permettre, s’il était élu, le paiement des taxes en trois ou quatre versements.
En 2024, Trois-Rivières fait figure d’exception avec ses deux versements.
Il suffit de consulter les sites web de plusieurs villes québécoises pour le constater. Une majorité de villes permettent le paiement des taxes en trois ou quatre versements. C’est le cas de Longueuil, Victoriaville, Sherbrooke, Québec, Gatineau, Saint-Jean-sur-Richelieu, Drummondville et Repentigny. Dans la région, La Tuque, Shawinigan et Nicolet permettent aussi le paiement en trois versements.
Dans le cas de Shawinigan, ça fait d’ailleurs jaser puisqu’on est revenu en arrière après avoir permis, l’an passé, le paiement en quatre versements.
Certaines villes offrent même une plus grande flexibilité. C’est le cas de Terrebonne, qui offre le paiement en cinq versements, de Granby, qui va jusqu’à six versements, et de Lévis qui fait presque figure d’exception avec son modèle de prélèvement préautorisé qui permet aux citoyens de payer leur compte de taxes municipales en 12 versements sans frais ni intérêts.
D’ailleurs, parmi les villes qui exigent le paiement en deux, trois ou quatre versements, plusieurs offrent aussi la possibilité de payer en six ou douze versements, moyennant certains frais afférents (Saguenay) ou certains intérêts applicables (Montréal, Drummondville).
Évidemment, il y a un coût à permettre l’étalement du paiement des taxes. Il y a quelques années, l’ex-maire Yves Lévesque l’évaluait entre 250 000 $ et 350 000 $ par année, principalement en raison des intérêts dont la Ville serait privée.
Il faut toutefois mentionner que ce ne sont certainement pas tous les contribuables qui se prévaudraient d’un ou de deux versements additionnels. Beaucoup de citoyens qui ont les moyens de le faire veulent acquitter leurs taxes au plus vite.
Et même si c’était le cas, même si on devait renoncer à certains revenus d’intérêt, on peut rappeler que la Ville de Trois-Rivières a dégagé, au cours des dix dernières années, des surplus de 108 millions. On doit bien être capable de donner un peu de répit aux contribuables sans que ça affecte de façon démesurée la capacité de payer de la Ville…
Certains disent que l’étalement des paiements nécessiterait l’affectation de ressources additionnelles au traitement des paiements. La fonction publique trifluvienne est-elle moins efficace que celle de toutes les autres villes mentionnées un peu plus haut?
Il y aurait une nécessaire adaptation, mais ça semble s’ancrer assez facilement et assez rapidement dans les mœurs des administrations municipales. On pourrait parier que la Ville éviterait de devoir gérer quelques ententes de paiement avec des citoyens qui se retrouvent dans une situation où ils ne peuvent acquitter leurs taxes en deux versements aux échéances prévues de façon stricte.
À la fin de 2022, certaines villes, dont Granby et Trois-Rivières – tiens, tiens! – anticipaient déjà une tendance à la hausse pour ce qui est de ces demandes d’ententes de paiement.
Et si on tient compte du nombre croissant de citoyens qui n’arrivent tout simplement pas à acquitter leurs taxes municipales à temps, ça mériterait certainement une réflexion. Il y a quelques mois, on apprenait qu’à Trois-Rivières, on trouve plus de 8600 immeubles sur lesquels les taxes exigibles depuis le 1er janvier 2022 n’ont pas été entièrement payées. C’est trois fois plus qu’en 2021.
En tenant compte du contexte économique, de l’inflation et de la grève du secteur public qui aura eu des incidences sur de nombreux budgets familiaux, il est difficile de croire que la situation ira en s’améliorant.
Il est temps que Trois-Rivières se mette au diapason de la plupart des villes comparables. Et qu’à défaut d’offrir un peu de répit à ses contribuables, elle leur offre au moins un peu de flexibilité.
Paiement des taxes: Trois-Rivières en retard sur ses semblables - Le Nouvelliste
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