Cela ressemble à un crédit à la consommation, mais sans paperasse et souvent sans frais apparents pour le consommateur : les solutions numériques comme Afterpay, qui permettent un paiement fractionné de petits achats, affichent une croissance fulgurante ces dernières années.
La jeune entreprise australienne, en passe de se faire racheter par l’américaine Square pour 29 milliards de dollars, est l’une des plus connues sur ce créneau, avec la suédoise Klarna. Mais d’autres acteurs s’y intéressent, comme le service de paiement PayPal, le géant du commerce en ligne Amazon ou même la banque postale française.
Selon une étude du cabinet Kaleido Intelligence, la valeur de ces paiements fractionnés a presque quadruplé entre 2018 et 2020 pour atteindre près de 80 milliards de dollars à l’échelle mondiale, et elle dépassera les 250 milliards d’ici à 2025.
« Achetez maintenant, payez plus tard » : comme résumé dans le slogan d’Afterpay, l’idée est de payer un achat en ligne en différé ou en plusieurs fois. « Le principe existe depuis assez longtemps, en revanche le processus de souscription n’était pas aussi fluide, performant et réactif », souligne Thomas Rocafull, analyste bancaire pour le cabinet Sia Partners et auteur d’une étude sur le sujet, interrogé par l’AFP.
Plus besoin de constituer un dossier ou de payer des frais d’adhésion comme pour une carte de crédit, tout se fait en quelques clics au moment de payer. En général, c’est le commerçant qui supporte les frais, même s’ils sont parfois imputés à l’acheteur, notamment en cas de retard de paiement.
« Pour les utilisateurs, c’est une option moins coûteuse que les cartes de crédit pour le financement d’achats, et le processus de paiement est pratique », souligne Nick Maynard, analyste pour Juniper Research. Et du point de vue du commerçant, explique-t-il à l’AFP, c’est « relativement simple » d’utilisation et « cela peut permettre d’augmenter la valeur moyenne des commandes et le taux de conversion », c’est-à-dire la part des visiteurs d’un site Internet qui effectuent réellement un achat.
Steffen Sorrell, analyste pour Kaleido Intelligence, estime ainsi que les commerçants qui proposent une solution de paiement fractionné ou différé voient la part des visiteurs qui finalisent un achat augmenté d’environ 20 %.
Marché « encombré »
Selon l’étude de Kaleido Intelligence, les Américains sont les plus friands de ce type de paiement, avec environ un tiers de la valeur totale des paiements fractionnés mondiaux en 2020, mais l’Asie monte en puissance.
En Europe, la situation est très variable. D’après Sia Partners, les règlements fractionnés représentaient l’an dernier 23 % des revenus du commerce en ligne pour la Suède et 19 % pour l’Allemagne. Loin derrière, l’Espagne et l’Italie pointent à seulement 2 % et la France, où restent privilégiés des modes de paiement « encore assez traditionnels », à 4 %.
« Nous allons assister à une explosion de cet usage en Europe du Sud », prédit cependant Thomas Rocafull. Jean-Pierre Viboud, patron d’Oney Bank, spécialisé dans le paiement fractionné, évoque lui aussi un « marché à très fort potentiel », avec une progression annuelle évaluée à 30 % en Europe.
Mais avec les offres qui se multiplient, « le marché est très encombré », relève M. Maynard, pour qui « une période de consolidation » est à prévoir. Le rachat d’Afterpay par Square en est l’exemple le plus récent.
En début d’année, Affirm, créé par un des cofondateurs de PayPal, a racheté le canadien PayBright, un an après que Klarna se fut offert l’italien Moneymour. En France, BNP Paribas a signé la semaine dernière un accord pour racheter la banque en ligne Floa, spécialisée dans les paiements innovants. Début mai, la Banque Postale s’est associée à la jeune pousse Alma, spécialisée dans les services de paiement fractionné et différé.
Pas sans risque
« Certains consommateurs ne sont pas conscients des conséquences s’ils font défaut sur leurs paiements, ce qui est mauvais pour tout le secteur », avertit néanmoins M. Sorrell. Avec Afterpay, les acheteurs qui ne peuvent pas honorer leurs échéances de paiement se voient infliger des pénalités.
Un consommateur peut aussi multiplier les paiements fractionnés en utilisant plusieurs offres. Un risque de surendettement que récuse M. Viboud : il assure que les impayés sont extrêmement faibles du fait de la courte durée du crédit, et davantage dus à de la fraude pure et simple.
L’un des enjeux pour le secteur reste d’ailleurs de trouver les moyens de bien vérifier les données de ses clients sans alourdir le processus de paiement.
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Paiement fractionné: «Achetez maintenant, payez plus tard», version «start-up» - Le Devoir
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