En début de semaine, la Commission européenne a accusé Apple de freiner la concurrence sur le marché des paiements sans contact sur mobile, n'autorisant que son outil Apple Pay à accéder à sa puce NFC, présente sur tous ses iPhone et nécessaire pour réaliser ce type de transaction. Le tout, au détriment d'autres systèmes, à l'image de Google Pay, Samsung Pay, ou encore Paylib (porté par un groupement de banques françaises). Une enquête était ouverte sur ce dossier depuis 2020. Cette semaine, Bruxelles a simplement informé par écrit à Apple des griefs à son encontre, lui permettant d'y répondre.
L'affaire en rappelle une autre. Il y a tout juste un an, l'Union européenne estimait déjà que le géant américain Apple faussait la concurrence, cette fois, sur le marché de la musique en ligne, en favorisant son application Apple Music, notamment aux dépens de Spotify, qui a déposé une plainte.
L'ampleur est cependant un peu différente pour l'un des plus gros vendeurs de smartphones au monde. "Le sans contact par mobile représente l'avenir du paiement, commente auprès de L'Express Marin Delattre, consultant chez Sia-Partners et spécialisé dans le domaine bancaire. C'est un secteur en forte croissance, qui est devenu très stratégique, et dans lequel de nouveaux acteurs investissent. L'Europe ne peut donc risquer de laisser Apple obtenir un monopole sur un marché aussi important."
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Pour le moment, Apple y a avancé ses pions en toute quiétude. En 2020, selon AB Bernstein, une société financière citée par The Economist, Apple Pay représentait à lui seul environ 5% des transactions mondiales par carte et prévoyait d'atteindre 10% d'ici à 2025.
Une ouverture de sa puce NFC pourrait diminuer cette part. Mais Apple peut se rassurer : la compagnie a déjà noué des partenariats avec environ 2 500 banques européennes, qui payent tous des frais pour utiliser sa puce NFC, rapporte Bloomberg. Pour ses concurrents, le mal est fait.
Et demain, l'App Store ?
L'enquête de l'Union européenne reste une mauvaise nouvelle pour la firme à la pomme. "Les arguments de défense d'Apple, et notamment celui de la sécurité de ses appareils, n'ont pas été jugés convaincants pour le moment", estime Marin Delattre. "Selon Apple, les risques de sécurité augmenteraient si l'accès était accordé à des tiers. L'enquête que nous avons menée jusqu'à présent n'a révélé aucune preuve qui indiquerait un tel risque de sécurité accru. Au contraire, les éléments de notre dossier indiquent que la conduite d'Apple ne peut être justifiée par des préoccupations de sécurité", a ainsi précisé l'Union européenne.
"Même si iOS, le système d'exploitation mobile d'Apple, ne représente qu'environ 25% des parts de marché en Europe, Apple est déjà très puissant sur le marché du paiement mobile. Et comme il s'agit de la seule entreprise à imposer de fortes restrictions sur son système, il n'y a, à mon sens, que deux issues possibles à cette affaire : un accord aboutissant à l'assouplissement des règles d'Apple, ou une sanction de l'UE", poursuit Marin Delattre. L'abus de position dominante peut aboutir à une amende atteignant jusqu'à 10% du chiffre d'affaires de l'entreprise.
Cette enquête intervient enfin dans un contexte particulier : celui de l'avènement du Digital Markets Act (DMA), présenté fin mars par l'Union européenne. Ce texte vise plus largement les grandes entreprises technologiques à ouvrir leurs plateformes à la concurrence. Mais Apple semble être une cible privilégiée. L'entreprise dirigée par Tim Cook "a construit un écosystème fermé autour de ses appareils et de son système d'exploitation iOS. Apple contrôle les portes de cet écosystème, fixant les règles du jeu pour tous", a encore déploré cette semaine Margrethe Vestager, la commissaire européenne à la Concurrence.
Si rien ne demeure acté, le DMA pourrait à terme obliger Apple à laisser ses utilisateurs télécharger des applications sans passer par son propre magasin en ligne, l'App Store. Une pratique, le "sideloading", qui mettrait à mal tout le modèle économique de l'entreprise à la pomme, déjà fragilisée par la plainte d'Epic Games, l'an dernier, contre les commissions de 30% imposées sur les abonnements et les téléchargements sur ce même magasin d'applications. Apple s'était alors adapté tant bien que mal, en laissant les applis payantes orienter les utilisateurs sur leurs sites, en dehors de la boutique en ligne de l'iPhone, qui esquivent ainsi ladite commission.
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Ce n'est pas tout. L'Union européenne a également porté la lutte contre Apple sur le hardware, le matériel. D'une part en légiférant pour l'uniformisation des chargeurs selon la norme USB-C. La compagnie basée à Cupertino proposait jusqu'ici ses propres câbles "Lightning". D'autre part en se positionnant pour le droit à la réparation des appareils. Outre-Atlantique, cette même aspiration a d'ores et déjà poussé Apple à proposer à ses clients américains des "kits de réparation", afin d'ouvrir eux-mêmes leurs iPhone et leurs MacBook. En bref, les fronts s'accumulent pour Apple. L'Europe est plus que jamais en guerre contre son écosystème fermé. Le même qui a contribué à faire d'Apple l'entreprise la plus valorisée au monde.
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