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Friday, July 21, 2023

À vos cartes de crédit ! - Le Devoir

On en parlait déjà en 2011. Le ministre québécois de la Justice de l’époque avait déposé un projet de loi comptant parmi ses mesures phares l’augmentation, de 2 % à 5 %, du paiement mensuel minimal exigé pour les cartes de crédit. La mesure est en vigueur depuis le 1er août 2019. Nous en serons à 4 %.

On soulignait alors qu’entre 15 % et 20 % des ménages ne paient chaque mois que le minimum requis. Avec un taux de crédit variant entre 8,99 % et 29,99 %, pour se situer en moyenne autour de 19,9 %, on invitait à imaginer l’impact du jeu de l’intérêt composé sur l’accroissement de l’endettement. Selon le calculateur de l’Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACFC), pour un solde de 1000 $ sur une carte dont le taux de crédit est de 19,9 %, un consommateur qui ferait un paiement minimal fixé à 2 % rembourserait sa dette en 25 ans et 10 mois, en payant des frais d’intérêt de quelque 3000 $. À 5 %, le remboursement s’étend sur six ans avec une dépense d’intérêt de 442 $.

L’Office de protection du consommateur ajoute que pour un consommateur ne remboursant que le minimum mensuel sur le solde de sa carte de crédit, la hausse d’un demi-point de pourcentage représente un versement additionnel de 5 $ par mois pour chaque tranche de 1000 $. Avec le paiement minimal fixé à 4 %, cette même dette de 1000 $ prendra sept ans et huit mois à être remboursée, avec des frais de crédit de 607 $.

Ce seuil minimal, à 4 % en août, poursuivra sa hausse pour atteindre 5 % en 2025 au rythme de 50 points de base annuellement. Les contrats de carte de crédit conclus depuis le 1er août 2019 ne peuvent prévoir un versement minimal mensuel inférieur à 5 % du solde.

Si l’on retient généralement que 70 % des détenteurs de carte de crédit paient leur solde en entier chaque mois, ils sont toutefois nombreux à mettre à contribution leur marge de crédit personnelle, qui commande un taux inférieur à celui d’une carte de crédit ou d’un prêt personnel, mais qui subit depuis le début de 2022 l’impact de l’austérité monétaire de la Banque du Canada.

Le tout est donc à mettre dans le contexte d’une solide remontée des taux d’intérêt combinée à une forte poussée inflationniste provoquant une explosion du coût de la vie dont le ressenti est amplifié par une érosion du pouvoir d’achat. Ainsi, la proportion de Canadiens qui disent être insolvables a atteint un nouveau sommet, selon le plus récent Indice des dettes à la consommation du spécialiste en insolvabilité MNP. Plus de la moitié (52 %) affirment qu’ils sont à 200 $ ou moins de ne pas pouvoir joindre les deux bouts à la fin du mois. De ce nombre, un peu plus du tiers (35 %) disent qu’ils ne gagnent pas assez d’argent pour régler leurs factures et rembourser leurs dettes, soit la proportion la plus élevée depuis la création de l’Indice il y a cinq ans, souligne MNP.

Pas étonnant, donc, que la demande de crédit soit demeurée élevée au premier trimestre. Selon le rapport d’Equifax Canada, la dette totale des consommateurs a augmenté de 4,9 % par rapport à la même période l’année dernière. Quant au solde des cartes de crédit, la hausse se chiffre à 14,5 % dans l’intervalle.

L’agence ajoute qu’en moyenne, les consommateurs dépensent 21,5 % de plus chaque mois sur leurs cartes de crédit, comparativement à avant la pandémie. En moyenne, ces dépenses ont surpassé 2200 $ ce trimestre par titulaire de carte, soit une hausse d’environ 400 $ par rapport au premier trimestre 2020. « La plus forte augmentation […] provient des consommateurs qui paient moins de 90 % de leur solde de carte de crédit chaque mois. »

Selon un portrait d’ensemble, au cours des trois premiers mois de l’année, 175 000 consommateurs supplémentaires ont affiché des défauts de paiement liés à au moins un produit non hypothécaire, ce qui représente une augmentation de 18,8 % comparativement au trimestre correspondant de 2022.

Si, à la fin de 2022, les taux d’arriérés étaient plus importants chez les consommateurs sans prêt hypothécaire, « les données récentes révèlent un nombre croissant de détenteurs de prêts hypothécaires affichant des défauts de paiement sur des produits non hypothécaires ». L’augmentation est de 15,7 % par rapport au premier trimestre 2022, et presque le double du taux de 8,9 % observé du quatrième trimestre 2021 au quatrième de 2022.

Emprunteurs hypothécaires en difficulté

Les emprunteurs hypothécaires ne l’ont également pas facile. Dans un sondage publié en juin, l’ACFC observe que :

• Plus du tiers (35,5 %) des Canadiens ont un prêt hypothécaire. Deux tiers d’entre eux ont du mal à respecter leurs engagements financiers. Ceux qui sont en mesure de le faire sans problème ont diminué de 22,2 points de pourcentage depuis le début du sondage (août 2020). Seul un détenteur sur trois déclare aujourd’hui pouvoir y faire face sans difficulté ;

• La proportion de ces détenteurs qui ont dû puiser dans leurs épargnes en raison du contexte économique a augmenté de 20 points de pourcentage depuis le début du sondage alors que le pourcentage de personnes qui dépensent plus qu’ils ne gagnent est à son plus haut niveau ;

• Le pourcentage des détenteurs devant de plus en plus emprunter pour couvrir leurs dépenses quotidiennes est passé de 27,3 % en août 2020 à 39,5 % en décembre 2022.

Et dire que, selon les données de Statistique Canada publiées cette semaine, la hausse des prix dans les épiceries (+9,1 % de juin à juin), du coût de l’intérêt hypothécaire (+30,1 %) et des loyers (+5,8 %) compte parmi les principaux facteurs ayant contribué à la hausse de l’inflation le mois dernier (sur 12 mois). Dit autrement, l’Indice des prix à la consommation a augmenté de 2,8 % d’une année à l’autre en juin. Mais l’indice d’ensemble excluant les aliments a crû de 1,7 % et celui excluant le coût de l’intérêt hypothécaire, de 2 %.

La Banque du Canada en a rajouté le 12 juillet, avec une hausse additionnelle de 25 points de base de son taux directeur, à 5 %.

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