Conflit au Moyen-Orient, guerre en Ukraine, crise de l'énergie, pandémie... L'économie mondiale n'en finit plus de traverser des crises à rallonge. Après un rebond économique post-covid en 2021 et 2022, les entreprises et les ménages en France sont à nouveau plongés dans un épais brouillard. Le gouvernement ne cesse de répéter que «l'économie résiste ». Mais les signaux d'inquiétude se multiplient.
L'OFCE a révisé à la baisse la semaine dernière ses prévisions de croissance pour 2024 et anticipe un retournement du marché du travail. Les derniers indices PMI de la France et de la zone euro, considérés comme des indicateurs avancés de l'activité économique, sont tous les deux en territoire négatif.
Dans ce contexte morose, les perspectives pour les entreprises s'assombrissent. Le dernier baromètre dévoilé par le cabinet ARC ce mardi 24 octobre indique que les pratiques des délais de paiement se sont détériorées entre 2022 et 2023. « Les entreprises sont moins confiantes sur la situation actuelle d'autant plus que l'Allemagne est en récession », a déclaré Denis Le Bossé, fondateur du cabinet d'avocats lors d'un point presse. « Les délais de paiement se dégradent. Les entreprises sont tétanisées d'aller réclamer le paiement des factures de peur de perdre des parts de marché ». Présent lors de l'événement, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a tapé du poing sur la table. « Il est inacceptable de faire peser l'allongement des délais de paiement sur les PME. Nous allons encore davantage mobiliser les moyens de la DGCCRF », a-t-il déclaré.
Les délais de paiement s'allongent de trois jours
L'un des résultats frappant de ce baromètre est que les délais de paiement sont passés de 12 jours à 15 jours entre 2022 et 2023. Et cette durée ne devrait pas s'améliorer dans les mois à venir. 83% (+3 points par rapport à septembre 2022) des entreprises estiment que ces délais vont devenir « une variable d'ajustement » et vont donc s'allonger dans le futur.
Sur l'ensemble de l'échantillon interrogé, 50% des entreprises déclarent qu'elles ont recours à un allongement de ces délais alors que 13% comptent utiliser leur découvert bancaire. « Les délais de paiement sont donc pleinement considérés comme un moyen de financement à part entière », soulignent les auteurs du baromètre.
Tensions sur les trésoreries
L'allongement des délais de paiement va mécaniquement avoir des répercussions sur les trésoreries des entreprises. « Ceci constitue, dans le contexte inflationniste actuel, un véritable risque pour la santé financière d'entreprises manquant déjà structurellement de fonds propres », a indiqué Denis Le Bossé. Cet allongement pourrait avoir des conséquences en cascade sur toutes les chaînes de sous-traitants si le ralentissement de l'économie se confirme en 2024. Dans certains secteurs comme l'énergie, le raffinage, l'information et la communication, les entreprises ont globalement tenu le choc de la pandémie. Mais d'autres dans la restauration ou l'immobilier par exemple n'ont pas retrouvé leur niveau d'avant crise ou traversent de fortes turbulences.
Des défaillances supérieures à la période pré-pandémie fin 2023
Les dernières prévisions du géant de l'assurance Allianz ne sont guère optimistes. «L'année 2023 devrait donner lieu à une nouvelle forte hausse : les défaillances d'entreprises devraient croître de 36% cette année, après avoir augmenté de 49% en 2022, pour s'établir à un niveau de 57.000 cas », indiquent les économistes. D'ici la fin de l'année, le niveau des faillites pourrait dépasser celui d'avant pandémie de 11%. Les hausses les plus marquées pourraient concerner les secteurs les plus soutenus pendant le Covid. A savoir l' hôtellerie-restauration, l'industrie et le commerce.
S'agissant de 2024, les faillites devraient se stabiliser à un niveau comparable à 2023. Pour le mandataire judiciaire Marc Sénéchal, « on assiste à une remontée massive du nombre de faillites. Mais en 2021, la France a connu son taux de faillite le plus bas depuis 50 ans ». L'extinction des aides Covid et le renchérissement du coût du crédit vont clairement mettre en difficulté des entreprises placées sous perfusion depuis des années.
Les entreprises déplorent le désengagement des banques
Le resserrement de la politique monétaire des banques centrales a considérablement durci les conditions de financement des entreprises et des ménages. Face à l'inflation, la BCE a relevé ses taux directeurs à des niveaux inédits depuis la création de la zone euro à la fin des années 90. « Les inquiétudes des entreprises sont parfaitement légitimes. Nous changeons de monde, a souligné Bruno Le Maire. L'argent qui était gratuit devient plus cher. Les taux étaient à 0%, ils sont à 4% », a-t-il poursuivi.
Dans ce contexte, les relations entre les entreprises et les banques se sont détériorées. Près de 80% (76%) des entreprises interrogées estiment que les banques se sont désengagées à l'égard des PME et TPE qui n'ont pas encore remboursé leur PGE. Et ce désengagement concerne également les sociétés d'assurance-crédit selon 62% des entreprises. Compte tenu des délais de transmission de la politique monétaire au reste de l'économie (entre 12 et 18 mois), les entreprises risquent encore de souffrir pour un long moment.
Menace sur les PME : les délais de paiement s'allongent - La Tribune.fr
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