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Monday, June 17, 2024

La Village essénien de Cookshire-Eaton en défaut de paiement de taxes - La Tribune

Sur ce montant, des versements totalisant près de 153 300 $ sont déjà échus, note la municipalité. À cela s’ajoutent ainsi des intérêts accumulés par l’Église de plus de 3200 $.

Une soixantaine de fidèles résident sur ce domaine, qui est évalué, selon la MRC du Haut-Saint-François, à 5 583 200 $.

Ayant interrompu à la toute dernière minute sa demande d’appel de la décision rendue dans le cadre de son litige avec la municipalité, l’Église essénienne chrétienne avance de son côté qu’elle «n’a pas refusé de payer les taxes», mais qu’elle espérait plutôt entamer un dialogue avec celle-ci et trouver un terrain d’entente, ce qu’elle n’a pas pu obtenir.

«Nous voulons avoir de bonnes relations avec tout le monde et respecter la Loi. Mais nous voulons comprendre ce que l’on doit payer, payer ce qui est juste de payer et pouvoir vivre selon nos croyances», exprime le président de l’Église, Florent Cecchella.

L’Église essénienne chrétienne du Québec est en différend depuis de nombreuses années avec la municipalité de Cookshire-Eaton en raison de l’utilisation de sa propriété agricole pour des rituels, cérémonies et séminaires religieux: le zonage municipal n’a jamais autorisé que des activités de culte puissent y être tenues.

Plusieurs bâtiments et lieux de culte s'étendent sur le vaste terrain agricole.

La dispute a été portée en Cour supérieure, devant laquelle l’Église a déploré ne pas avoir été entendue par la municipalité lorsque celle-ci avait demandé, sans succès, à ce que soit modifié le règlement de zonage pour y permettre la tenue d’activités religieuses.

La Municipalité maintient que lorsque l’Église a fait l’acquisition de son vaste domaine du chemin Brochu en 2007, il avait plutôt été question de lieu de tourisme et de villégiature, une fin alors intégrée dans le règlement de zonage. Une affirmation qu’ont niée les représentants de l’organisme ayant pris en charge l’acquisition sous le nom de Fondation Essenia, plaidant que la Ville était bel et bien au courant de ses usages visés de lieux de culte.

La juge Line Samoisette a finalement statué, en décembre 2021, qu’il n’y avait pas atteinte à la liberté de religion et que l’Église devait cesser toute activité de culte afin de se conformer au zonage de la municipalité.

Décision acceptée

Après des démarches pour porter sa cause en appel et des prolongations de délais, l’Église s’est finalement désistée tout récemment, ce qui a rendu officielle la décision.

«En laissant tomber l’appel, ça nous donnait raison que ce n’était pas un lieu de culte, donc un lieu taxable», explique le directeur général de Cookshire-Eaton, Martin Tremblay.

«Au départ, lorsqu’ils ont laissé tomber l’appel, ils semblaient prêts à discuter pour payer les taxes, mais là ils ne veulent plus les payer».

—  Martin Tremblay, directeur général de Cookshire-Eaton

Pour sa part, Florent Cecchella, déplore plutôt un manque de collaboration de la municipalité «Pour montrer notre bonne foi, nous avons annulé l’appel. La municipalité était prête à nous rencontrer. Après le jugement, la municipalité n’a plus voulu discuter avec nous.»

Un compte de taxes de 125 176 $, rétroactif pour 2022 et 2023, a été envoyé en septembre dernier aux responsables du Village essénien de l’Érable. Alors que l’ensemble des versements demandés pour ces deux années seront échus le 25 juin prochain, aucun paiement n’avait toujours été reçu au moment d’écrire ces lignes. À cela s’ajoute également le compte de taxation pour 2024 envoyé en début d’année, qui est de 57 915, 78 $.

L’Église essénienne a confirmé son intention de ne pas payer par voie de courrier recommandé à la Ville, selon celle-ci.

Selon M. Cecchella, il est hors de question de perdre le domaine de plus de 250 acres où vivent une soixantaine d’esséniens.

«Nous voulons régler la situation le plus simplement possible, dit-il. Ce litige dure depuis bien trop longtemps. Il a coûté beaucoup d’argent aux deux parties.»

—  Florent Cecchella, président de l'Église essénienne chrétienne et de l'Église essénienne chrétienne du Québec

Bâtiments sans permis

Plusieurs esséniens qui ont choisi de s’établir au Village de l’Érable ont versé à l’équivalent de la valeur de leur propriété à l’Église en échange de la construction de leur demeure et d’un contrat de «droit de jouissance» avec la corporation religieuse. Ce contrat prévoit que ceux-ci pourront récupérer leur investissement s’ils cèdent la place à un nouvel occupant essénien.

L’Église a également elle-même construit certains bâtiments à visées locatives, en échange d’une contribution communautaire.

Or, certains bâtiments présents sur le site ont été construits sans permis, avance Martin Tremblay. Une situation qui a d’ailleurs fait contribuer à faire baisser le total des taxes à percevoir, dit-il, puisque l’évaluation de la MRC ne prend en compte que les bâtiments construits avec un permis.

«En plus d’avoir été construits sans permis, certains bâtiments ont été construits dans la zone verte. La Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) pourrait carrément demander à ce qu’ils soient déplacés ou démolis», note M. Tremblay.

Activités de culte

Le lieu de culte dédié à l'archange Gabriel et aux anges représentant des vertus.

Interrogé à savoir si des activités de culte étaient toujours tenues sur place même si une juge a ordonné à l’église de cesser celles-ci, M. Cecchella a répondu que «les membres de l’église qui vivent au Village de l’Érable pratiquent leur religion chez eux ou dans la nature».

Lors d’une visite le 15 mars dernier, La Tribune a pu constater qu’un séminaire religieux était en cours de déroulement dans un bâtiment partagé par la communauté.

En 2016, la CPTAQ a fait parvenir à l’Église une ordonnance lui enjoignant de cesser toute activité non agricole de sa propriété, à l’exception de quelques zones précises, et de détruire ou déménager tous les bâtiments qui n’étaient pas visés par une exception. On exigeait aussi de démanteler tous les installations et bâtiments voués au culte, notamment le monument en l’honneur de l’archange Gabriel et les statues autour. Celui-ci s’y trouve toujours.

Le plus ancien lieu de culte du Village de l'Érable, où 12 érables ont été plantés en cercle.

Contestée par la corporation religieuse, cette ordonnance a été confirmée en 2018 par un juge du Tribunal administratif du Québec. L’Église s’est ensuite vue refuser sa permission d’appeler devant la Cour du Québec.

Martin Tremblay précise qu’une visite de la CPTAQ a été faite en début d’année. Si son rapport conclut à l’utilisation des lieux à des fins de culte, des amendes municipales pourraient être données à l’endroit de l’Église.

La CPTAQ confirme de son côté qu’une enquête est toujours en cours, mais qu’elle ne peut en dévoiler les détails pour le moment.

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