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Tuesday, May 23, 2023

États-Unis : quelles seraient les conséquences d’un défaut de paiement ? - Le Point

Les États-Unis sont au bord de la banqueroute. Un scénario catastrophe jugé « très probable » par Janet Yellen, la secrétaire au Trésor, qui pourrait arriver dès le 1er juin. Afin d'éviter que le pays ne se retrouve à court d'argent public, Joe Biden et Kevin McCarthy, le chef de l'opposition, se sont rencontrés afin de négocier pour trouver un compromis budgétaire.

Concrètement, pour lever ce risque, il faut que le Congrès – le Sénat tenu par les démocrates et la Chambre à majorité républicaine – vote pour relever le plafond maximal d'endettement public autorisé. Les républicains exigent, pour donner leur feu vert, une forte réduction des dépenses publiques. Joe Biden, qui fait campagne pour sa réélection en 2024 sur une promesse de justice sociale, s'y oppose. Mais que se passerait-il si la première économie de monde n'était plus en mesure de payer ?

Les Américains sans salaire

Pour les Américains, cela sera une catastrophe. « Tout Américain qui dépend de manière directe ou indirecte d'un paiement du gouvernement ne sera plus payé », a résumé Gregory Daco, chef économiste pour EY Parthenon. Cela concernerait donc les salaires et les retraites des fonctionnaires et militaires, les prestations sociales liées à l'enfance, aux soins de santé, aux bas revenus, aux personnes âgées…

La situation serait la même pour les entreprises travaillant pour le gouvernement : « Elles ne seront plus payées non plus », ajoute-t-il. Car le Trésor risque « de manquer de liquidités pour payer des centaines de milliards de dollars » de factures, souligne Nancy Vanden Houten, économiste pour Oxford Economics.

Par ailleurs, « si les marchés boursiers chutent, […] l'épargne des gens et l'épargne-retraite seraient pénalisées », a indiqué Nathan Sheets, chef économiste pour la banque Citigroup.

Les marchés mondiaux fortement impactés

En 2011, déjà, le pays n’était pas passé loin du défaut de paiement. Immédiatement, les marchés avaient réagi. La Bourse de New York s’était effondrée, avec une chute du S & P 500 « de l’ordre de 13-14 % », rappelle Gregory Daco, pour qui cette situation causerait un « stress énorme ».

Ce qui ferait tout basculer : le fait que les États-Unis soient incapables de rembourser les porteurs de bons du Trésor, placement roi de la finance mondiale.

« Les investisseurs internationaux décideront-ils de se replier et de ne plus investir ? », interroge Gregory Daco. D'ores et déjà, ils sont devenus « plus réticents à détenir de la dette souveraine qui arrive à échéance en juin », a récemment alerté Janet Yellen.

À LIRE AUSSILa Banque centrale américaine relève, encore, son principal taux directeurEt, si le prix des obligations américaines s'effondre, « la situation serait catastrophique pour tous les organismes qui détiennent beaucoup d'obligations publiques émises par les États-Unis, comme les banques, les fonds de pension, les compagnies d'assurances, ou les fonds de placement collectifs », note Éric Dor, directeur des Études économiques à l'école de commerce IESEG. Avec, souligne-t-il, un risque de faillites et « des effets en chaîne avec une nouvelle crise financière globale ».

Quant au dollar, il « se déprécierait très fortement », relève-t-il encore. Or, le système financier mondial « dépend de la stabilité du dollar », soulignait le Center for american progress dans une note du 11 mai.

Mais, comme en 2011, l'or pourrait être le grand gagnant : « C'est la valeur refuge », parce que dans le cas d'une menace de défaut de paiement, « le dollar va baisser, les rendements obligataires vont baisser et les actions chutent », a prévenu Jack Ablin, de Cresset Capital.

Des effets désastreux sur l'économie américaine

L'équation est simple. Si le gouvernement arrête de dépenser, les ménages feront de même. Et leur consommation étant la locomotive de l'économie américaine, cela mettrait un grand coup de frein dans la machine. « L'impact économique vient simplement du fait que le gouvernement arrête de dépenser », résume Gregory Daco.

Une dépense plus faible du gouvernement signifie « que la famille, qui ne touche pas son chèque […], ne va pas pouvoir dépenser la même chose en allant faire les courses, ce qui […] va affecter le magasin dans lequel ils font leurs courses, ce qui va ensuite affecter leurs propres décisions de recruter… »

À LIRE AUSSILes États-Unis proches du défaut de paiementPar ailleurs, le gouvernement n'étant plus en mesure de payer ses fournisseurs, « les sociétés dont l'État américain est client seraient menacées […] de faillite », ajoute Eric Dor.

Les impacts financier et économique cumulés pourraient coûter à l'économie américaine 5 % de PIB, estime Gregory Daco : « On parle d'un choc plus significatif que la contraction du PIB pendant la crise financière. On parle d'un choc énorme. »

Pas d'impact immédiat sur l'économie mondiale

Les effets d'une crise économique américaine pourraient évidemment se propager à l'échelle mondiale. D'autant plus que les taux d'intérêt des « obligations émises par les États-Unis augmenteraient très fortement », avec des réactions en chaîne : « baisse de l'investissement des entreprises et des ménages, ainsi que de la consommation, et donc une forte récession aux États-Unis », qui pourrait se propager « en Europe et ailleurs », anticipe Éric Dor.

Mais Nathan Sheets nuance : « Je ne pense pas que la croissance mondiale ou la croissance américaine seront affectées cette année de manière significative. » La situation pourrait, paradoxalement, profiter à certaines entreprises américaines exportatrices, car une dépréciation du dollar « augmenterait la demande étrangère pour leurs produits en les rendant effectivement moins chers », selon une note du Council on Foreign Relations du 2 mai.

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