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Friday, July 9, 2021

Bruxelles veut durcir les règles du paiement fractionné - La Tribune

Le paiement fractionné (paiement en 3X ou 4X) est un marché en pleine vitalité. Il connaît une croissance rapide, de 20 à 30% selon les pays, il répond aux nouvelles attentes des consommateurs et des marchands, surtout en ligne, et une foultitude d'acteurs, nouveaux ou historiques, proposent chaque jour des innovations pour faciliter les paiements. Ce succès a cependant son revers : les autorités, notamment européennes, s'inquiètent d'un risque de dérapage et de surendettement des ménages, notamment parmi les plus fragiles.

Bruxelles est donc à la manœuvre. Un projet de révision de la directive de 2008 sur le crédit à la consommation, visant à renforcer la protection du consommateur dans un monde de plus en plus digitalisé, est en cours d'examen. Le texte de 75 pages ; dont La Tribune a eu connaissance, est complexe mais un principe semble se dégager : celui de réintégrer dans la réglementation du crédit à la consommation tous les types de prêts de faible montant et de courte durée qui y échappaient jusqu'ici.

Tous les crédits logés à la même enseigne

Sont ainsi concernés les mini-prêts, les avances de trésorerie de moins d'un mois mais également le paiement différé ou fractionné. En France, il s'agit des prêts de moins de 200 euros et d'une durée inférieure à 3 mois qui ne sont pas concernés par la loi Lagarde de 2010 sur le crédit à la consommation, qui a sensiblement renforcé l'information et le droit des consommateurs (et facilité au départ l'essor du paiement fractionné).

Dès lors, adieu les propositions de crédit « sans justificatifs » ou « immédiates », en ligne ou sur le point de vente. Le fournisseur de crédit ou de paiement aura, en effet, une obligation d'information du consommateur (afin qu'il comprenne bien que l'offre est bien un crédit qu'il faut rembourser), selon les mêmes principes qu'un crédit classique (TAEG, respect du taux d'usure, droit de rétraction). Le professionnel aura également l'obligation de vérifier la solvabilité de l'emprunteur.

L'objectif de protection des consommateurs, défendu par les associations de consommateurs, est louable, mais le texte risque de compromettre ce qui fait la force du paiement fractionné : sa simplicité et son immédiateté, grâce à un parcours client « sans frictions ». Le texte suggère également des dispositions pour mieux encadrer les acteurs du paiement fractionné alors qu'il ne se passe pas une semaine sans qu'un nouvel acteur ne propose une formule miracle.

Devant ce foisonnement de l'offre, certains professionnels établis redoutent en effet qu'un des acteurs ne puisse pas honorer un jour ses engagements de paiement vis-à-vis des marchands et jeter ainsi une ombre sur l'ensemble du secteur. Pour l'instant, aucun problème sérieux n'a été constaté, y compris au Royaume-Uni où le marché est particulièrement actif.

Retour en arrière

Mieux, les professionnels mettent en avant un taux de défaut structurellement bas, autour de 1%, pour écarter tout risque de surendettement lié au paiement fractionné. « Au contraire, sa durée très courte est un rempart contre le surendettement », plaide ainsi un banquier. Les montants concernés sont également faibles, autour de 180 euros le panier moyen chez un des leaders du secteur. « Même du côté de la Banque de France, ces facilités de paiement sur des durées très courtes ne sont pas perçues comme toxiques », avance un autre professionnel.

« Nous ne mesurons pas encore les conséquences de ce texte assez dense mais l'esprit est bien de supprimer l'exception dont bénéficient actuellement les crédits de courte durée, de moins de 60 ou 90 jours, selon les pays », réagit un banquier qui travaille pour un poids lourd du secteur. « Ce serait en quelque sorte comme un retour en arrière par rapport à une facilité de paiement qui a été offerte jusqu'ici. C'est un peu comme si le régulateur imposerait un retour à un plafond de 30 euros pour le paiement par carte sans contact alors que le relèvement du plafond à 50 euros a permis d'ancrer le paiement sans contact dans les habitudes de consommation des ménages », ajoute ce connaisseur.

Toutefois, tous les professionnels interrogés reconnaissent comme légitime l'intérêt des autorités pour ce marché en plein boom. Même si les montants restent encore marginaux dans le total des crédits accordés aux ménages. En France, le paiement fractionné est estimé à environ 6 milliards d'euros de production en 2020 (contre 41 milliards de crédit à la consommation), et sans doute, à une dizaine de milliards de milliards en 2021.

Concentration du secteur

La directive amendée risque de compliquer (un peu) le parcours client, et de contraindre les acteurs à investir davantage dans la technologie pour intégrer le volet conformité. « Il y a déjà une volonté forte des acteurs et des clients, consommateurs et marchands, à proposer cette même facilité de paiement sur des durées plus longues, de 12 ou 24 mois », observe un professionnel. Ce même banquier estime également que le régulateur va s'intéresser à la question du cumul pour éviter qu'un même client multiplie les achats en paiement fractionné sur un délai très court.

C'est notamment ce que voulait prévenir un groupe de parlementaires britanniques travaillistes avec son initiative « Stop the Klarnage ! », jeu de mot construit à partir de Klarna, l'un des leaders européens du paiement fractionné, qui vient d'ailleurs de se lancer en France. L'offensive parlementaire a cependant fait un flop.

A court terme, la mise en œuvre de la directive risque d'accélérer la concentration du secteur, aujourd'hui très éparpillé avec de nombreuses fintechs. Les nouvelles exigences vont peser sur les marges, déjà faibles et imposer de nouveaux processus.

BNP Paribas en passe de racheter Floa Bank

« Tout le monde sait que le marché va se concentrer autour de 4 ou 5 acteurs contre une vingtaine aujourd'hui », avance un professionnel. Déjà, les grandes manœuvres sont engagées. BNP Paribas devrait annoncer, dans les prochaines semaines, le rachat de Floa Bank (ex-banque Casino), l'un des deux leaders du secteur et ce, « pour un prix élevé », selon un observateur.

La réglementation devrait ainsi donner une prime aux acteurs les plus importants, capables de supporter des surcouts, ou qui bénéficient déjà des processus de conformité sur le crédit. En revanche, les fintechs qui fondent leur avantage compétitif sur la souplesse de leur solution pourraient davantage souffrir. Reste les marchands, notamment dans l'e-commerce qui profitent à plein de ces facilités de paiement, surtout en période de déconfinement.

« Je ne suis pas certain que les e-commerçants aient vraiment mesuré la portée de ce texte européen. Ils risquent d'être vent debout, de peur que cela tue dans l'œuf la reprise de l'activité, notamment dans le tourisme », estime un banquier.

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